Édition

1201. Pratique éditoriale

Nous ne répondons plus aux envois mal ciblés (sauf si vous commandez 10 exemplaires de chacun de nos livres : vous recevrez alors une belle lettre de refus, frappée à votre nom).

Le nombre des écrivains augmente, les digues geignent, les fissures courent, l’inondation menace, le déluge gronde. Nous sommes à la merci d’un clic. (Bordel de merde ! – retenez votre envoi !)

 

Au moins ai-je réussi au bout de quatre ans d’exercice à me conformer à un usage de la profession : le silence hautain face à l’urgence scripturale de mes contemporains. – Que vaut mon manuscrit ? (Rien.)

Votre courage m’émeut. Vous allez au devant d’une kyrielle de refus que seul le masochisme de votre structure psychique excuse. Quel besoin d’être publié(e) quand la rentrée toujours s’annonce ! Contentez-vous d’écrire pour vos tiroirs. Songez qu’à chaque nouveau dépôt vos écrits voient le jour.

Ou bien créez votre maison d’édition.

(Le nombre des maisons d’édition augmente, les dingues poussent, les fistules explosent.)

1178. Bagout et Bakou

Tout le monde semble gagné par le désir d’indépendance : le libraire, le critique, le lecteur, l’écrivain, le blogueur et jusqu’à l’éditeur. En un mot : plus personne ne souhaite payer ses livres.

J’ai eu confirmation que de nombreux libraires poussaient l’indépendance jusqu’à refuser de régler leurs factures. J’en avais fait quelquefois l’expérience à l’époque où je diffusais les livres des Doigts (des pieds et des mains). La chose aujourd’hui se confirme. Cette réalité nous oblige à une action de salut public. Nous préparons une page Facebook : « Ton libraire pue, changes-en ! »

Il existe par ailleurs des libraires libres dans toutes les villes de France. C’est pour eux que nos cœurs battent et là que nous voulons placer nos livres. Nous préparons une page Facebook : « Ton libraire lit, prends soin de lui (en plus il paie ses livres). »

 

Je viens de lire un opuscule de Blanqui* imprimé en Europe de l’Est par une maison d’édition qui publie aussi Jaurès, Kropotkine, Hugo et Louise Michel. Contaminé par la sueur bulgare, le lecteur s’en savonne les doigts d’enthousiasme. L’émulsion lui tient lieu de révolution. Nous préparons une page Facebook : « Ton éditeur de gauche est un capitaliste de droite : Et toi ? »

* « Les riches font travailler les pauvres. » À peu près, en effet, comme les planteurs font travailler les nègres, mais avec un peu plus d’indifférence pour la vie humaine. Car l’ouvrier n’est pas un capital à ménager comme l’esclave ; sa mort n’est pas une perte ; il y a toujours concurrence pour le remplacer. Le salaire, quoique suffisant à peine pour empêcher de mourir, a la vertu de faire pulluler la chair exploitée ; il perpétue la lignée des pauvres pour le service des riches, continuant ainsi, de génération en génération, ce double héritage parallèle d’opulence et de misère, de jouissances et de douleurs, qui constitue les éléments de notre société.

Auguste Blanqui, Qui fait la soupe doit la manger, p. 21

 

Nous remercions les éditions d’ORES ET DÉJÀ de nous avoir fourni la théorie et son illustration un premier jour de mai. Grâce à son directeur, Blanqui l’insurgé peut se coucher sur la lunette arrière.

 

Bonus et parachute doré pour le lecteur curieux de petits éditeurs militant tout schuss sur la pente bulgare du meilleur prix : Le dernier télégramme, Cambourakis, Les nouvelles éditions Cécile-Defaut, les Éditions de l’Attente… (Comptez sur nous pour compléter la liste.)

 

Nous souhaitons incliner à mort la pente de nos amis. Il y a toujours concurrence pour les remplacer. (Nous préparons une page Facebook.)

1134.

« Bonsoir et merci à vous de répondre si vite et si
personnellement ; c
‘est gentil, et d’exprimer votre goût sincère, précis de parti pris, tout en ménageant le travail
d’auteur. 
»


Voilà. Il s’agit de moi. J’ai des dizaines de retours similaires qui attestent mon
humanité
exécrable. J’en tire une très modeste vanité d’éditeur.

 

(Je tiens cachée la petite collection de méchantes ripostes à mes belles insultes.)

 

Précis de parti pris ferait un joli titre.

 

Je le réserve. Merci.