1004.

 Patience. Demain nous célébrons la mort d’un romancier qui ne nous a jamais vraiment quittés. Balzac est mort le 18 août 1850.

 

J’ai trouvé le moyen de contourner les grosses ficelles que l’on me vend pour du roman, des constructions géniales, des imaginaires inédits, des prouesses de
suspense, des révélations fracassantes : je ne lis plus aucune intrigue, le monde est pour moi un désert anonyme, j’ai renoncé à retenir le nom des personnages, refuse de suivre leurs
déplacements d’un bout à l’autre de leur appartement et jamais ne les suis sur les routes des vacances, de sorte que leur absence est ma seule compagnie, ils n’ont plus d’existence, je ne
m’intéresse plus qu’aux traces laissées par l’encre, au fil ténu de quelques phrases qui tirent leur langue jusqu’à moi, à quelques mots méritant une oreille de sauvetage. Très peu survivent au
test. L’amas de feuille fait plomb et file au fond.
Dans la flopée, pas un roman qui vaille le temps passé. Un coton-tige est plus romanesque. Monsieur
Lecteur, Madame Lectrice, vous êtes floués. Le libraire s’est payé sur vos heures de vacances. Le critique mord dans le mou qui vous sert de cerveau, les imprimeurs bulgares vous bouffent à
travers le fauteuil en osier et l’éditeur pulvérise ses records d’approvisionnement. Vous n’êtes plus bons qu’à suçoter des saucisses frites sur les aires d’autoroute, aller-retour et sens
inverse. Consolez-vous. Vous serez le Goncourt de notre rentrée.