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Dissonances 23 faisait peau neuve, maquette liftée, appelant la beauté du présent numéro dédié au Mal, puisqu’il faut l’appeler par son nom, capable en un mot d’enrichir la littérature.

 

Couverture clarifiée dans une perspective d’allègement, Dissonances y gagne sa limpidité aérienne, son éther vertigineux, sa robe de fluidité. Finie la
graisse typographique dont s’enrobaient ses années de prudence ! Dix ans, une majorité. Dissonances n’a plus peur du vide. C’est là sa force morale et sa grande qualité = le risque
qu’elle prend de s’en remettre au hasard de ses goûts singuliers, imparfaits, légitimes, que je ne partage pas toujours, sinon en amitié. Surtout, la revue s’en remet aux talents bien trempés qui
s’offrent au jeu de l’anonymat poussé dans sa logique du texte pour le texte.

 

Sans nom d’auteur, le dernier livre d’Au choix serait-il accepté par l’éditeur qui d’habitude le publie  ?

 

Ici, point de commande, pas de passe-droit, nul copinage. La revue Dissonances choisit des textes que des auteurs
envoient, curieux principe.

 

Insistons-y. Toutes les revues en place, à commencer par Décapage, que l’anti-rouille ne gratte certainement pas, sont en mesure de publier un
auteur en vue. Seule Dissonances s’offre la simplicité de publier ou de refuser son texte.

 

À dire le vrai, on compte peu d’audacieux parmi les écrivains en place. L’anonymat ne les tente guère, ni la virginité d’une porte fermée.

 

(Ceci est un défi. Quel pleutre le relèvera ?)

 

Le principe de publication est donc simple : les textes sont rendus anonymes avant lecture par une tierce personne. Les grincements de dents qui en résultent font
la joie des dentistes (voir l’édito de Jean-Marc Flapp) ; les prothésistes n’en dorment plus de joie, les vampires s’entre-sucent, les névrosés mangent leur psychanalyste.

 

Cela dit, les mines atterrées du comité de lecture découvrant le nom en place qu’il vient de refuser sont tout aussi réjouissantes : la vertu a ses contraintes et
le suicide, parfois, ses vocations.

 

Car aucune revue, à ma connaissance, ne se risque à publier ou refuser un texte sur la seule base d’un goût forgé par la lecture. La littérature y gagnerait
pourtant de faire ses preuves par la littérature, excluant de ce fait les séductions involontaires du nom d’auteur, ses mondanités. Peu de revues affichent des goûts littéraires, finalement,
beaucoup présentent des marques de fabrique.

 

Faites l’expérience suivante : conciliez-vous la bienveillance d’un écrivain en place, suffisamment vénal ou facétieux, qui publie en revue, Décapage par
exemple. Envoyez-lui le texte que vous avez écrit, auteur sans nom, écrivain du dimanche, illettré notoire (au choix). Demandez (corrompez, suppliez) qu’il l’envoie sous son nom. Tenez-moi au
courant.

 

Cette pratique de l’anonymat témoigne d’une belle confiance en soi des trois, aujourd’hui quatre larrons du comité de lecture, capables de s’en remettre à leur
jugement, à leur culture, en s’exposant aussi aux canulars toujours possibles…

 

La qualité du dernier Dissonances tient en quelques noms pour la surprise des textes, des images, et dans la revue tout entière pour son parti pris
d’ouverture aux voix qui se présentent, sans recommandation autre qu’elles-mêmes. Cela s’appelle : Une revue de littérature. 

 

Courageux anonymes, grands écrivains pleutres, autres combinaisons possibles, préparez-vous ensemble à un amer combat : le numéro 25 de Dissonances entend
vous faire la peau, dès juillet
2013.

 

 

 

PS : En attendant, soyez pas rats sur vos paillasses : rabonnez-vous.